6.22.2009

épique et kilogrammes 2

Dakar, lundi 15 juin, après une douche tonifiante, rafraîchissante et bienvenue après presque 24 heures de dur travail non-stop, Pascal, Amison et moi sautons dans un taxi en direction de la gare routière, pour trouver une voiture 7 places qui pourrait nous conduire à Ziguinchor, à 450 Km vers le Sud. Il est à peu près 21h30 quand nous arrivons à la gare routière ; nous sommes épuisés, mais tranquilles, presque serein. Nous négocions avec le 1er dispatcher qui vient à notre rencontre ; l’endroit est sombre, seulement éclairé par les phares de quelques voitures. La seule chose qui nous importe à cet instant est d’obtenir les meilleures places ; nous avons tous essayé les 3 places du fond : insupportable. Pendant qu’Amison reste auprès des bagages, nous nous décidons pour une très graisseuse omelette avec des pommes de terres sautées, notre 1er repas depuis 24h.

Quand nous sommes de retour, Amison est à l’intérieur, mais la voiture n’est pas pleine. Il y a juste un étudiant métis étranger qui a pris la 4éme place, ce qui signifie 3 places encore à pourvoir avant de pouvoir partir. Pascal et moi montons dans la voiture, il est 22h, je suis assis, mais je tombe néanmoins dans un profond sommeil, peut-être instantanément. Minuit, je me réveille, la voiture est ballottée par le chargement des bagages qu’ils sont maintenant en train de couvrir d’une bâche. Toutes les places sont pourvues, un autre jeune étudiant à Zig, une mère âgée et probablement sa fille d’âge mûr. Nous partons enfin, silence dans la voiture.

J’adore être très fatigué quand je voyage, dormir dans un avion c’est comme un double vol, ça marche aussi en train, en voiture, dans n’importe quoi : le double voyage. Mais je ne dors pas encore, la voiture s’arrête 2 Km plus loin, le chauffeur sort et discute avec un jeune en salopette, pas de son dans la voiture. Le chauffeur est de retour, mais il ne ferme pas sa portière, il essaie de démarrer, sans succès. Finalement le jeune en salopette pousse la voiture qui démarre, on est parti. La fille d’âge mûr saute sur le chauffeur en Wolof, lui disant que la route est très longue et mauvaise, qu’elle ne partira pas dans une mauvaise voiture, elle veut qu’il lui donne son argent ou une autre voiture. Elle a raison évidemment, mais personne ne réagit à l’intérieur de la voiture, je suis tellement fatigué, comme hypnotisé ; je me sens en confiance, en sécurité et impatient de bouger. Devant une si faible résistance, le chauffeur n’a aucune difficulté à faire passer ce discours sensé pour de mauvaises paroles. Silence ! je coule et glisse dans un sommeil sans fond et sans rêve. Je me sens bien ; demi-épave me berce.

Je me réveille, il est 4h et nous sommes seulement à Kaolack à 200 Km de Dakar. Le chauffeur s’est arrêté à une station essence, l’embrayage est naze, et la voiture refuse de démarrer. En sortant pour aller pisser, je remarque que les phares sont très faibles et j’achète un café à un vendeur ambulant. Je bavarde avec les autres passagers, « La femme avait raison ». Je m’éloigne et m’assieds seul sur une chaise près d’un vendeur de fruits. Ok ! je sais, je ne contrôle pas tout le truc ; j’ai appris à attendre. L’air est frais et cool, pourquoi pas moi ? Quelques voyageurs sont allongés sur le sol, sous un abris à la limite de la station, pourquoi pas moi ? Je me lève et marche lentement vers mes compagnons de route, le jeune étudiant de Zig vient de rencontrer un ami à lui, et devinez quoi ? Il est chauffeur…Hypnotisé ! Il conduit un microbus, plutôt neuf, le luxe en somme… Idem ! Pendant que nous sourions et blaguons avec Pascal et les autres, les deux chauffeurs marchandent et négocient.

5h on part, ; cool ! Il fait toujours sombre, violet sombre ! Fin de Kaolack et fin de la vraie route, maintenant c’est plutôt une voie hybride entre la route et la piste, la pire ! nous sommes secoués et remués dans un rodéo funky de rêve. Je me réveille ! Pascal se marre une main sur mon épaule « t’arrives à dormir, mais là tu tombes ! » Le jour est juste sur le point de se lever ; c’est juste très beau, je rêve encore ? …Idem ! je garde les yeux ouverts sur le paysage qui défile, surfant sur le présent éternel, les couleurs aussi défilent, de plus en plus claires. Soudain le paysage ralenti et s’arrête, il y a des gens sur le bord de la route, tandis que d’autres sont assis sur le sol. Le chauffeur est descendu. Sur le côté gauche de la piste-route, je vois un minicar blanc, portes ouvertes, planté dans le sable après avoir manifestement quitté la bonne route accidentellement. Personne ne semble être sérieusement blessé. Il est 7h, le mardi 16 ; nous poursuivons notre chemin en approchant de la frontière gambienne. Sur la route, nous croisons un camion bloqué qui aurait pu être le nôtre, nous nous regardons, Pascal et moi, sans dire un mot. Après avoir croisé le 5éme camion bloqué sur la route, je me suis arrêté de compter, tellement...

Il est à peu près 9h ; je m’extirpe du fond du microbus pour atteindre le bureau des douanes. Quand j’en ai terminé, je donne mon passeport au chauffeur avec 2000 Francs pour aller plus vite. Nous sommes en Gambie en direction du fleuve du même nom, la frontière naturelle de la Casamance. Nous sortons tous du bus qui doit faire la queue pour embarquer sur le bac. Nous avons le temps de petit-déjeuner, mais je n’ai pas faim, je commande un café. Pascal ne peut pas finir ses œufs durs, je mords dans son sandwich, mais je ne peux rien avaler, mon ventre me joue des tours. Nous marchons lentement vers le bac, un jeune homme me propose de cirer mes chaussures poussiéreuses, ok mais vite, le bateau est là et le chargement a commencé. Le jeune homme prend tout son temps ; il a l’air d’aimer son travail. Pascal est sur le point d’embarquer, il remue les bras au loin pour me prévenir. « Tu as le temps, ne t’inquiètes pas ! » dit le jeune homme, je sais qu’il a raison, mais pas Pascal dont le visage lointain semble nerveux. Je dois soulager mon compagnon de route, je presse le jeune homme qui n’a pas le temps de finir la seconde chaussure, et je marche rapidement vers le bac. On est assis à bord, en attendant la fin du chargement. Je pense au jeune cireur de chaussure… au prix de l’amitié. Nous avons traversé le fleuve, les frontières, de retour au Sénégal, il est à peu près 10h nous entrons en Casamance. Nous sommes maintenant dans la zone à risques, où les rebelles ont livré leurs dernières attaques, …Idem ! je me réveille ! Pascal dort toujours comme presque tout le monde dans le bus. Mon ventre me fait mal, j’ai besoin de m’arrêter, mais j'ai hâte de gagner Zig. Le périple est haché par les nombreux arrêts aux check points militaires. Il est midi quand nous arrivons à Bignona ; les militaires veulent garder les bottes d’Amison qu’ils ont trouvées dans les bagages, bla bla bla ! mon ventre me fait mal, je ne suis plus du tout hypnotisé. Amison a payé ; de retour sur la route de Zig, dernière étape. Enfin nous approchons du pont qui traverse le fleuve Casamance, la route est boueuse, il a plu il n’y a pas si longtemps. Nous venons de traverser le pont, dernier arrêt, dernier check point à l’ombre de quelques flamboyants étincelants de rouge saturés. Il est 13h la lumière est à son paroxysme, il fait très chaud ! Amison a essayé de joindre Asper sur le camion à plusieurs reprises sans succès. Ce n’est pas la priorité immédiate ; je dois rentrer à la maison rapidement, s’il vous plait ! Laissez-moi atteindre la petite maison rouge…

À suivre…





2 commentaires:

  1. Que de péripéties ..J'attends avec impatiente
    enfin votre arrivée et évidemment avec tout le matériel!Mamy Gaby

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  2. Salam à vous grand frère Patriss Gomis comment vous allez?
    Heureux de vous lire enfin après tant d'années sans nouvelles. C'est moi le petit diola Papisco Sagna de Ziguinchor qui vous avez soigner la main avec les poudre. Je suis toujours à Ziguinchor dans mon home studio et j'ai toujours le morceau de reggea que vous avions faites ensemble.
    Jespère que vous allez très bien et bien des chose a tout le monde.

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