1.19.2009

je perds la Terre







Ziguinchor, la nature dans la ville, la ville dans la nature, je me sens bien ici.
Aussi bien que peut l’être un guerrier de la paix sans argent, dans l’attente d’outils pour commencer son travail. Je marche beaucoup, comme d’hab., comme je l’ai toujours fait, à Paris, Dakar, et partout où je reste un peu. Très tôt depuis l’enfance, quand mes grands parents me laissaient seul des après-midi entières, à parcourir la luxuriante campagne poitevine, j’ai réalisé que la musique venait comme par magie pendant les longues marches. Quelle stupéfaction de trouver, beaucoup plus tard, dans la préface d’un traité de composition, le conseil de marcher régulièrement. En tout cas, c’est une très bonne façon de découvrir et de s’orienter dans un nouvel endroit. On peut voir beaucoup plus de détails à cette vitesse bien sûr, sous des angles différents, mais on peut aussi être vu en détail, et ma chevelure folle ne passe pas vraiment inaperçue.
Ça allait encore à Dakar, une grande ville, polluée et surpeuplée, avec tellement de fous et d’excentriques, j’étais en bonne compagnie. C’était à peu près similaire à ce que j’avais connu dans toutes les grandes villes que j’ai visitées, excepté qu’ici je me suis retrouvé dans la catégorie des blancs, toujours un étranger. « Quand tu nais métis tu perds la Terre et tu gagnes l’univers » m’a dit un jour ma vielle amie Rohany, moitié Allemande, moitié Malaise et très à l’aise. Je traque l’universel depuis.

Dakar Ok ! mais ici à Zig, c’est comme si je venais de sauter d’une soucoupe volante (j’ai perdu la Terre). Quand j’ai débarqué, je suis allé 10 jours chez un cousin éloigné que je ne connaissais pas. La famille Africaine n’a pas de fin. Presque tout le monde dans le quartier, et même des gens que je n’avais jamais vus auparavant m’appelaient par mon nom après quelques jours, j’avais hâte de partir dans ma petite maison rouge un peu retirée. Vous pouvez penser que je n’ai qu’à me couper les cheveux pour trouver la paix. Je l’ai fait pourtant, en 2002 après mon premier voyage en Afrique, mais ça n’avait pas changé grand chose. Alors j’ai décidé de les laisser à leur état sauvage, comme symbole de ma liberté acceptée. La liberté a un prix comme chaque chose, et j’ai tous les jours de nouvelles factures.
Je ne suis pas venu ici pour me cacher, mais l’heure du show n’est pas encore venue, et après 8 mois de cohabitation mouvementée dans la maison de mon père à Dakar, j’apprécie vraiment la solitude. Alors je marche dans la nature le jour et dans les rues de Zig le soir.

J’ai fini par emménager dans la petite maison rouge, sans aucun meuble, juste un matelas sur une natte, plutôt zen, le terrier du guerrier. J’attends mes bagages, et je dois économiser l’argent pour aller jusqu’au bout du rêve.
J’ai une bonne relation avec mes voisines directes, une femme mûre d’environ la soixantaine, et sa fille avec qui je me sens particulièrement à l’aise. Elle n’est pas très jolie, mais à l’air intelligent, bon sourire. Nous n’échangeons que quelques mots en wolof, la langue la plus parlée au Sénégal. Mon wolof est terriblement pauvre, je commence à comprendre les conversations les plus banales, mais je fais surtout l’effort de parler car je sais que c’est apprécié.
Salut, au revoir, à ce soir, Je suis certainement perçu comme une curiosité dans mon nouveau quartier, mais les gens sont très respectueux et me laisse tranquille, ce qui me donne une raison supplémentaire d’aimer cet endroit.


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